Divorce et bail : conséquences du divorce et de la séparation sur la titularité du bail

« Si le copreneur solidaire ayant expressément renoncé au droit de rompre seul le contrat reste tenu de la totalité des loyers impayés jusqu’à la résiliation du bail, faute de stipulation contraire, cette solidarité ne s’applique pas au paiement de l’indemnité d’occupation ».

par Yves Rouquet publié le le 21 juin 2018 sur dalloz.actualités.

Civ. 3e, 14 juin 2018, F-P+B, n° 17-14.365

Par cet arrêt de censure partielle, la Cour de cassation confirme, d’une part, qu’en cas de solidarité, les copreneurs restent tenus des obligations locatives même en cas de délivrance d’un congé et, d’autre part, que sauf clause contraire, la solidarité ne vaut pas pour le paiement de l’indemnité d’occupation due par l’ancien locataire qui se maintient dans les lieux après résiliation du bail.

Sur le premier point, l’originalité de l’espèce tient au fait que, par une stipulation du bail, les copreneurs, solidaires et tenus indivisiblement, avaient accepté de ne pouvoir donner congé que simultanément avec les autres.

En pratique, cette précaution rédactionnelle ne s’avère pas très utile, puisqu’il est aujourd’hui bien établi qu’en présence d’une clause de solidarité, les colocataires restent – en toute hypothèse – tenus solidairement du paiement des loyers, même en cas de départ effectif de l’un d’eux à la suite d’un congé (Civ. 3e, 8 nov. 1995, n° 93-17.110, Bull. civ. III, n° 220 ; D. 1996. 368 , obs. CRDP Nancy II ; RDI 1996. 285, obs. F. Collart-Dutilleul et J. Derruppé ; 30 sept. 2008, n° 07-16.957, AJDI 2009. 23 , obs. F. de La Vaissière ; 2 oct. 2012, n° 11-22.812, AJDI 2012. 862 ).

La solution retenue par l’arrêt sous étude est conforme à cette jurisprudence, l’un des copreneurs ayant, en dépit de la stipulation contractuelle susmentionnée, donné congé indépendamment de son copreneur.

On rappellera, à toutes fins utiles, qu’aux termes de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, issu de la loi ALUR du 24 mars 2014 en matière de colocation (au sens du texte, ie, en dehors de la location consentie exclusivement à des époux ou à des partenaires liés par un PACS au moment de la conclusion initiale du contrat), la solidarité d’un des colocataires prend fin à la date d’effet du congé régulièrement délivré et lorsqu’un nouveau colocataire figure au bail. À défaut, elle s’éteint au plus tard à l’expiration d’un délai de six mois après la date d’effet du congé.

Quant au second point (absence de solidarité pour le paiement de l’indemnité occupation, sauf convention contraire), elle s’inscrit également dans le sillage d’une jurisprudence particulièrement constante rendue au visa de l’ancien article 1202 du code civil (devenu, depuis l’ordonnance du 10 févr. 2016, l’art. 1310 du même code), selon lequel la solidarité ne se présume pas (écartant la solidarité des copreneurs pour le paiement de l’indemnité d’occupation faute de clause espresse en ce sens, v. not. Civ. 3e, 13 juin 2001, n° 99-18.382, AJDI 2001. 875 , obs. P. Briand ; 5 mai 2004, n° 03-10.201, D. 2004. 1502 ; ibid. 2005. 749, obs. N. Damas ; AJDI 2004. 449 , obs. Y. Rouquet ; RTD civ. 2004. 510, obs. J. Mestre et B. Fages ; 1er avr. 2009, n° 08-13.508, D. 2009. 1142, obs. Y. Rouquet ; ibid. 2010. 1168, obs. N. Damas ; AJDI 2010. 26 , obs. N. Damas ; 12 janv. 2017, n° 16-10.324, D. 2017. 430 , note S. Tisseyre ; ibid. 1149, obs. N. Damas ; AJDI 2017. 358 , obs. Y. Rouquet ; ibid. 498, étude M. Moreau et Joséphine Adda ; AJ fam. 2017. 199, obs. J. Casey ; RTD civ. 2017. 129, obs. H. Barbier ; ibid. 418, obs. P.-Y. Gautier ; pour un exemple de clause contraire, v. Civ. 3e, 24 mars 1999, n° 97-12.982, Bull. civ. III, n° 75). »

Maître Clémentine FORTIER, avocat
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